Plaidoyer pour le Rojava – B. Şoreş

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B. Şoreş
Plaidoyer pour le Rojava
Réflexions d’un internationaliste 
sur les aléas d’une révolution
A peine la victoire sur Daech était-elle proclamée que le gouvernement des Etats-Unis s’en attribuait le mérite et invitait le président turc, Erdogan, à envahir les territoires que les Kurdes avaient conquis sur le «califat» dans le nord de la Syrie. Ces derniers, principalement ceux du Parti de l’Union démocratique (PYD) proche du PKK, qui avaient joué un rôle prépondérant dans la victoire contre les djihadistes, après avoir été caressés dans le sens du poil par la « communauté internationale », étaient de nouveau les ennemis que les Etats-unis et l’Union européenne considéraient comme terroristes.
Plusieurs milliers d’internationalistes de toutes nationalités partirent combattre les islamistes de Daech aux côtés des forces révolutionnaires kurdes. L’auteur de ce livre fut l’un d’entre eux. Son plaidoyer pour le Rojava n’est cependant pas synonyme d’aveuglement car l’objectivité est la condition d’un positionnement politique.  Aujourd’hui, les « gentils » d’hier sont redevenus les « méchants » d’avant-hier en fonction des seuls intérêts géo-stratégiques des grandes puissances impérialistes dans la partie d’échec qu’elles se disputent au Moyen-Orient pour le contrôle des ressources fossiles.
On savait bien que les Kurdes devraient payer l’addition pour avoir géré l’autonomie du Rojava en y expérimentant un projet politique, démocratique social, féministe et pluriculturel, qui, au moment où, comme en Irak ou au Liban, des prolétaires se soulèvent pour la justice contre les classes politiques, pourrait bien séduire ceux que les clivages religieux, ethniques ou nationaux divisent artificiellement au Moyen-Orient.
Dans les combats qui s’annoncent, quel que soit leurs adversaires, les combattants kurdes ne pourront compter que sur eux-mêmes.
20 euros, 300 pages, 16X24

35 ans de correction sans mauvais traitements

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Il sera question dans ce récit d’un drôle de métier, celui des correcteurs – devenus largement des correctrices au cours des trois dernières décennies.

Leur tâche consiste à la base, rappelons-le, à intervenir dans les imprimeries, les maisons d’édition et les entreprises de presse sur chaque texte destiné à être diffusé par écrit, afin de le décoquiller et d’unifier sa présentation tout en veillant à sa conformité avec les règles d’orthographe, de syntaxe et de typographie. Néanmoins, ne vous fiez pas à l’austérité d’une telle description : vous le constaterez ici, s’adonner à la relecture n’engendre pas forcément la mélancolie.

Je ne vous raconte pas ma vie. J’utilise, au prisme de mes souvenirs, des épisodes de mon parcours professionnel pour apporter un éclairage sur l’évolution de la correction depuis trente-cinq ans, et sur ses conséquences, dans des sociétés de presse et d’édition où j’ai été salariée comme dans le Syndicat des correcteurs – composante du Livre CGT mais de sensibilité anarcho-syndicaliste – où j’ai été adhérente.

De plus, les changements de statut qui sont intervenus dans ces sociétés constamment en cours de modernisation ou de restructuration sont toujours allés de pair avec une volonté patronale d’abaisser les rémunérations et avec une dégradation des conditions de travail. C’est pourquoi j’ai également voulu témoigner sur l’ambiance que créaient dans leurs murs pareilles réorganisations, ainsi que sur certaines pratiques de harcèlement largement d’actualité – des pratiques contre lesquelles il faut, selon moi, ne jamais cesser de s’insurger.

Vanina

2011, 180p, 12 €

 

 

Tête de mêlée

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Jean Bernier

Publié pour la première fois en 1924 et jamais réédité depuis, Tête de mêlée raconte le parcours d’un jeune garçon qui parvient, grâce au sport, à s’arracher aux affres de l’enfance et de l’adolescence, à échapper à sa Folcoche de gouvernante et au milieu bourgeois d’avant 1914, étriqué, bigot, imbu de sa classe sociale et décrit  ici d’une façon particulièrement fine et cruelle.

Il s’agit d’un véritable hymne au sport en général et au rugby en particulier. Le lyrisme, la précision et l’humour avec lesquels ce jeu, qui, au début du XXe siècle essaie de percer en France,  est décrit, font de Jean Bernier, pour le ballon ovale, ce que sera Antoine Blondin pour le cyclisme, quelques décennies plus tard.

Mais chez Bernier la grande guerre n’est jamais très loin. Les espérances de « ces jeunes hommes au corps habile et fort, à l’âme prompte » avant 1918 sombreront dans la guerre quelques semaines plus tard sous les « tonnerres monotones de la chimie industrielle », termine-t-il.

« De quelque angle qu’on considère les temps modernes, la guerre de 1914 y apparaîtra toujours plus comme le tournant décisif. » écrivait Jean Bernier, mobilisé et envoyé au front en septembre 1914 à l’âge de vingt ans, puis blessé en décembre 1915. De cette « expérience » naîtront en 1920 un roman (La Percée1) et de solide convictions pacifistes et internationalistes. Dès la sortie de la guerre ses convictions politiques le conduisent à adhérer à l’ARAC (association républicaine des anciens combattants, fondée dès novembre 1917) et à participer à partir de 1921 à la revue communisante Clarté aux côtés des Barbusse, Vaillant-Couturier, Raymond Lefebvre, Boris Souvarine et même Victor Serge et Magdeleine Paz. Tout autant que militant, Bernier est un écrivain qui fréquente des milieux littéraires et artistique et en particulier les surréalistes — ami d’Aragon2, amant de Colette Peignot3, par leur intermédiaire, il œuvre, à partir de 1925 à un rapprochement entre le groupe Clarté et ces surréalistes dont il apprécie le pamphlet Un cadavre consacré à la mort d’Anatole France. Pour la petite histoire, André Breton appréciera peu le goût de Bernier pour le sport !

Journaliste, outre sa participation à Clarté, il collabore au Crapouillot de Jean Galtier-Boissière, et, à partir de 1924, à L’Humanité où il tient une rubrique « vie sociale » avant de s’y consacrer à la rubrique « Sport », en 1926. Il s’éloigne ensuite progressivement du PCF et collabore avec des oppositionnels comme Boris Souvarine à la Critique sociale à partir de 1931. Il se rapproche alors des anarchistes du Libertaire de l’Union anarchiste communiste. Devenu correcteur, il fonde avec Chazé, Guilloré et Lazarévitch (le mari d’Ida Mett) un cercle lutte de classe dans la CGT, et se fait propagandiste de l’Espagne noir et rouge.Il sent bien qu’une nouvelle guerre se dessine et en 1936 il signe, avec Georges Bataille et Lucie Colliard un tract « travailleurs vous êtes trahis » au nom d’un « Comité contre l’union sacrée ». En 1937, il écrit pour le Crapouillot  l’« Actualité de l’anarchisme »4 récemment republiée.

De nouveau mobilisé en 1939, fait prisonnier en juin 40, libéré fin 42, il arrête tout militantisme après avoir tenté de s’occuper d’une organisation officielle de prisonniers de guerre en zone occupée (il la quitte au bout de deux mois). Il reprend après la guerre ses activités de journaliste en se limitant à l’étude de la politique internationale et à rentre compte de la réalité russe avec Nicolas Lazarévitch. Il meurt en 1975.

1. La Percée, Albin Michel, 1920, rééd. Agone, 2000.

2. Aragon a 30 ans lorsqu’il adhère au PCF en 1927, à une période où tout le monde le quitte !

3. Personnage important des milieux intellectuels radicaux de l’entre-deux-guerre, cet écrivain deviendra la compagne de Georges Bataille.

4. En 2014 avec les « réflexions sur l’anarchisme » de Victor Serge, aux éditions Acratie.